Il y a quelques années (en 2007, déjà 5 ans mon Dieu!), nous sommes partis à Montréal. Nous y avons passé dix jours de pur bonheur, à la découverte d'un pays que nous ne connaissions pas, mais également d'une culture et d'une gastronomie qui restait très mystérieuse.
J'ai adoré ce pays, les gens qui le peuplent, l'accent rempli de joie, les spécialités à la limite des traditions françaises avec une pointe d'américanisme, et les paysages à couper le souffle. Un jour, j'y retournerai. Ne serait-ce que pour manger une poutine, plat archi-connu qui semble peu ragoûtant mais que j'ai beaucoup aimé, ou des donuts glacés à l'érable.
Durant ce voyage, nous sommes allés manger dans une auberge médiévale située à Montréal. L'endroit y était magique : décors rappellant l'époque, le personnel habillé médiéval, des plats plus appétissants les uns que les autres, des cris, des animations, des chants, des rires. Si seulement un tel endroit existait en Belgique!
Suite à cela, j'ai voulu en apprendre un peu plus. J'ai donc acheté un livre sur la Nouvelle-France avant de rentrer en Europe. Voici quelques informations culturelles à ce propos. Cuisiner, c'est bien. Mais pour enrichir sa pratique, il faut aussi connaître ses ingrédients et son histoire.
Festoyer en Nouvelle-France
Remontons aujourd'hui dans le temps, à plus de 250 ans de cela. Je vous parle du 18e siècle. Avant l'an 1763, on appelait *Nouvelle-France* les territoires situés en Amérique du Nord et qui se trouvaient sous l'administration française. On compte environ 10.000 personnes qui vinrent élire domicile au Canada entre 1608 et 1756. Un large partie de ces nouveaux canadiens venaient du nord-ouest de la France. De nombreux artisans en faisaient partie. A peu près un tiers de ces personnes étaient alphabétisées.
A leur arrivée, que leur fallait-il faire? Ils décidèrent donc de se lancer dans l'agriculture. La majorité se lança dans le blé, histoire de pouvoir faire du pain, mais certains optèrent aussi pour l'orge ou le tabac. Ils avaient aussi créé leur petit potager afin de cultiver leurs petits légumes et possédaient parfois des bêtes qui leur donnaient du lait, des œufs, voire de la viande.
| L'arrivée |
Retournons voir nos petits colons. A leur arrivée, ils firent des découvertes culinaires : le maïs, la citrouille, quelques fruits sauvages également. Le maïs était LA céréale que les Amérindiens utilisaient le plus, mais nos chers immigrants n'y voyaient qu'un gros désavantage : cette céréale ne permettait pas la création d'un pain aussi bon que celui confectionné avec du blé.
La vie des colons ne fut pas facile au début, comme vous pouvez vous en douter. Cependant, il semblerait que leur qualité de vie s'améliorera au cours du 18e siècle, une fois qu'ils s'étaient bien installés dans l'agriculture, que les terres furent défrichées et rentables pour les cultiver. Selon certains historiens, les canadiens, de manière plus générale, auraient même eu à cette époque une qualité de vie supérieure à la majorité des Européens.
| Se nourrir |
Si vous vouliez acheter des produits français en Nouvelle-France, il fallait passer par l'import. Ceux-ci étaient vendus à un prix exorbitant et étaient, dès lors, plutôt des produits de luxe. Par contre, la bière artisanale était très répandue ainsi que la fonction de vin à base de fruits de la région.
La population se nourrissait beaucoup de pain, de potages et de galettes. Heureusement, ce n'était pas toujours le cas. La fête de Pâques leur permettait de manger de l'agneau ou des œufs, avec Noël on pouvait déguster de la poule ou des chapons.
Les premières générations des immigrants, bien que ne possédaient plus toutes les produits et aliments présents en France, continuaient à manger à "l'européenne". Cela signifiait concrètement qu'ils s'inspiraient de la "gastronomie" de l'époque médiévale. C'est vers le 18e siècle qu'une cassure s'opère : à bas les épices qui se trouvent à la pelle dans les plats. Ils veulent goûter les aliments présents dans les plats. Ils veulent du *vrai* goût.
Des plats feront d'ailleurs leur apparition à cette époque. Je pense à la **tourtière** qui, pour l'époque, pouvait se résumer à un pâté composé de plusieurs morceaux de tourtes qui avaient honteusement baignés dans une sauce blanche. Aujourd'hui, la tourtière est un pâté de lard haché qui n'a plus rien avoir avec son idée d'origine.
Pas encore de frigidaire oblige, il fallait trouver des techniques de conservation d'aliments. Les colons reprennent alors les idées des Amérindiens, telles que le fumage de la viande ou du poisson. Sans oublier l'enfouissement de la nourriture dans le sol afin de les préserver du gel. La technique de salaison, issue de l'Europe, sera cependant toujours largement utilisée.
| La suite |
Il faut chercher du côté des femmes, mais aussi des institutions religieuses si on désire suivre le développement de la tradition culinaire au Québec. Toutes les "filles de roi" qui venaient au Canada dans l'espoir de se marier étaient directement prises en charge par les religieuses. Elles y suivaient un enseignement comportant, entre autre, la cuisine. C'est en 1840 qu'est publié le premier ouvrage de recettes. Celui-ci s'intitulait simplement *La Cuisinière canadienne*. Les recettes s'inspirent bien entendu de recettes typiques du pays, mais également de recettes anglaises, françaises ou américaines, qui menaient la belle vie au Québec à l'époque et circulaient de plus en plus.
L'histoire ne s'arrête pas ici, loin de là. Peu à peu le Canada développe sa propre tradition culinaire pour offrir ce que nous luis connaissons aujourd'hui. Mais ça, c'est une autre histoire... :)
**Source**
La cuisine de la Nouvelle-France, Editions de l'Homme, 2006, Montréal.